[Zeste d'avis] « Mes 50 modèles bullet agenda »
D'une chronique sur des compléments pour bujo à Montessori, le concept derrière un outil, la loi de l'attraction, les vases communicants à la maison...
Hello les détendu·e·s du citron !
J’essaie un nouveau type de rubrique, j’espère que ça va vous plaire et vous être utile. L’idée c’est que, au lieu de collectionner les liens ou les ressources dans un coin, je vous fasse part de mes découvertes et je vous dise aussi ce que j’en pense.
Au revoir syndrome de l’imposteur, au passage ! Je me rends compte que juste mon avis peut avoir son intérêt, pas que je sois une super critique littéraire, mais tout de même mon expérience et ce que j’ai appris peut vous aider à naviguer dans la jungle des tonnes de bouquins ou ressources de développement personnel : il y a à prendre et à laisser ! Un peu de vulgarisation à partir de connaissances validées ne pourra qu’apporter un peu de vision objective dans tout ça.
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Un répertoire de modèles de bullet agenda
J’ai toujours été tentée par l’idée du bullet agenda depuis que je l’ai croisée il y a quelques années déjà sur internet. J’ai toujours aimé le papier, les jolis stylos, c’est bête, mais je suis comme une gamine avec ça et ça ne s’arrange pas en ayant fait une formation de sketchnoting ! - Que je recommande, au passage, c’est aidant pour arriver à revenir sur ses notes ou mieux exprimer graphiquement des idées, plus vite qu’en faisant un powerpoint.
Comme je le disais il y a quelques jours ici, après plusieurs essais infructueux j’ai fini par mettre en place assez régulièrement l’usage de mon bullet agenda, en réunissant à la fois les côtés pro et perso, et je ne me pose (enfin !) plus la question d’utiliser autre chose, ce qui a l’air de vouloir dire que cette organisation me paraît fonctionner.
Donc quand j’ai fait le petit tour du vide-grenier auquel je contribuais dimanche dernier, et que j’ai trouvé ce livre parmi d’autres trouvailles, je me suis dit que ça pouvait toujours servir, et en même temps, que ça pourrait être utile de vous raconter ce que j’en pense.
👁️ Présentation de l’outil
Ce livre est donc un répertoire de 50 modèles de pages pour donner des idées pour son bullet agenda, publié par Powa, blogueuse que je ne connaissais pas.
Pour rappel, le bullet agenda c’est une méthode d’organisation basée sur un carnet où tu mets strictement ce que tu veux, avec une logique de un pas à la fois : pas la peine de vouloir remplir forcément beaucoup à l’avance, tu crées plutôt des pages sur mesure au fil de l’eau, en fonction des besoins.
On y trouve donc des modèles, présentés à chaque fois sur une double page avec le modèle, et l’explication de son utilisation. Ce qui est effectivement intéressant, parce qu’il n’est pas toujours évident de saisir d’office la logique d’un modèle seul, même avec un exemple de comment il est rempli.
On y trouve des modèles beaucoup perso, un peu pro, ce qui est très bien pour couvrir un peu tous les domaines dont on peu avoir besoin et s’inspirer.
Derrière un modèle, une philosophie
J’allais dire qu’il y a des modèles classiques, et d’autres moins, mais même les classiques peuvent être faits de façon différente : la puissance du bullet agenda et d’avoir des idées de modèle pour le remplir, c’est finalement qu’un modèle est à la fois un cadre graphique, un design, et aussi sous-tend une idée, une façon de voir les choses pour le remplir. Ce n’est donc pas juste une addition de trucs jolis un peu superficiels : c’est joli ET ça oriente dans une certaine façon de faire, ça propose de regarder les choses d’une certaine manière, ce n’est pas rien, en fait.
Il y a un design, et une philosophie derrière chaque design.
Ca me rappelle la pédagogie Montessori, où il y a le matériel en lui-même, qui peut n’avoir rien de fondamentalement marquant à première vue, et la logique derrière le matériel, ce qu’il permet de faire, avec toutes ses caractéristiques précises et pensées pour un but précis.
Par exemple avec la tour rose : c’est juste 10 cubes, roses, de taille croissante de 1 à 10 cm de côté.

Rien de mirobolant, n’est-ce pas ? Ils sont tous de la même couleur, même pas varié, rien d’écrit dessus, c’est tout. C’est pas clinquant. Et pourtant, chaque matériel est pensé pour cibler une seule dimension à apprendre, et pas 40 choses à la fois, ce qui surchargerait l’enfant et le ferait se disperser. Chaque dimension est précise, ce qui permet de varier les combinaisons possibles pour essayer des choses et commencer, indirectement, à compter; si on met le cube de 9 et celui de 1 à côté, ça fait la même largeur pile que le cube de 10, etc… Ca permet à l’enfant d’expérimenter, réfléchir … Bref : il y a le matériel, et toute la présentation qui fait qu’on peut voir comment s’en servir.
Dans cette pédagogie, tout est sous-tendu par une vision de l’enfant capable, qui apprend par lui-même, du moment qu’on est capable de lui fournir l’environnement adéquat et l’occasion de prendre conscience de ses erreurs lui-même. Elles sont intégrées à l’apprentissage et pas du tout tabou ni vues comme négatives, elles font partie du chemin et on progresse petit à petit, ce sont juste des occasions de corriger. Il n’y a pas de mise en échec et l’adulte ne porte pas le fait de faire remarquer l’erreur à l’enfant : le matériel est fait pour qu’il s’en rende compte lui-même, ça ne marche simplement pas comme lors de la présentation, si on se trompe. Alors l’enfant va chercher et réfléchir… Bref, je pourrais en parler longtemps. Revenons à nos moutons.
Là, c’est un peu pareil pour le bullet journal. Il y a le modèle, et l’intention derrière le modèle.
Une des intentions de base, proposée dans la méthode, pour ce que j’en ai compris, c’est d’être un lieu pour se vider la tête et trouver au même endroit tout ce dont on a besoin dans sa vie quotidienne; et un autre principe de base paraît être de se déculpabiliser et (pour ?) arrêter de procrastiner : on a des endroits avec des listes de tâches, mais c’est normalisé que certaines tâches ne soient pas faites, puisqu’il y a même un code graphique pour ça, une flèche sur la case de la tâche pour dire qu’elle est reportée. On fait le tour de celles qui n’ont pas été faites, on les réécrit dans la nouvelle liste, et voilà.
Quand j’ai découvert ça, j’ai trouvé ça vraiment très différent des outils de to-do lists classiques, qui t’encouragent toujours à faire des tâches, mais qui te laissent toujours un arrière goût de culpabilité parce que :
il en reste (forcément)
celles que tu as faites ont disparu (souvent - ou sont toutes entassées et augmentent ta charge visuelle…)
souvent l’outil te récompense pour celles qui sont faites mais parfois aussi insiste trop sur le fait que ce qui reste n’est pas censé exister ! donc ça devient culpabilisant quand tout n’est pas fait (déjà que ça l’est au départ).
On a toute latitude pour faire tout ce qu’on veut dans son bullet journal. Oui, mais quoi ? On va forcément piocher des idées. Et avec les idées, des façons de voir la vie, le travail…
Quand on utilise un modèle, on chausse les lunettes de celui qui l’a créé.
La vigilance est donc de vérifier que les lunettes de celui qui fait le modèle, nous vont. On n’est pas obligés d’avoir tous la même vision, et si un modèle porte une idée qui nous emmène dans une direction qui ne nous convient pas, mieux vaut s’en rendre compte et ne pas l’utiliser ou l’aménager différemment. On peut avoir un peu trop tendance à se dire que la personne est experte et que si elle dit de faire comme ça, il faut le faire… Mais, tout dépend quels sont les fondements du modèle.
Sur quoi est construit le modèle ?
Un outil est construit selon une logique. Son créateur lui-même, peut ne pas s’en rendre compte, il a ses propres lunettes sur le monde, mais il les trouve logiques, normales : pour chacun de nous, notre vision est généralement la seule qui nous paraît valable… et on n’imagine pas toujours qu’il y en ait d’autres, surtout si on n’a pas forcément grandi dans une démarche scientifique : ré-interroger ce qu’on croit, avancer pas à pas, selon ce que la réalité nous renvoie.
Tout comme dans la démarche de
dans les Clés de l’Infox Santé, ou d’Elisabeth Feytit de Méta de choc. Allez voir au passage, c’est chouette et instructif. Enfin, je trouve, de ma vision évidemment !Là, l’auteur ne nous dit pas sur quel fondement ses modèles sont construits : j’imagine, à partir de la philosophie de base du bullet journal, et d’autres idées sans doute récoltées un peu partout, au gré de ce qu’elle a dû expérimenter et découvrir qui l’intéressait.
Est-ce important ?
Je trouve, oui. Utiliser un outil te fait suivre un chemin précis, la logique qu’il porte avec lui, peut soit t’apprendre à prendre soin de toi, soi t’emmener dans une démarche qui ne t’aide pas ou au pire, te piège. Et ça ne se voit pas forcément au départ. Ca peut être très joli ET très culpabilisant, en même temps. Un peu comme la main de fer dans le gant de velours. Et, vigilance : c’est quelque chose qui peut revenir assez souvent dans tout ce qui est développement personnel. Ca demande donc à être finement épluché pour ne pas faire n’importe quoi.
D’où la difficulté que j’ai à créer des outils, moi-même : sans tomber trop dans le perfectionnisme - je crois - je suis très vigilante dans l’usage que peut engendrer mon outil avant de le sortir, du coup, ça prend du temps, même si ça ne se voit pas.
🧠 Ce que j’en pense
Ce que j’aime
ll y a beaucoup de modèles. C’est justement la richesse des modèles, qui fait l’intérêt du livre. Il y a de quoi faire, sur beaucoup de thèmes, on peut les reprendre tels quels ou s’en inspirer, c’est assez varié pour forcément trouver une idée qui correspond à ce que vous cherchez.
C’est une très bonne source d’inspiration, il me semble qu’il y a des choses qu’on ne voit pas partout.
Certaines pages portent une logique tout à fait constructive (je pense), comme :
celle sur ses propres qualités à lister (cependant, si on a déjà assez d”estime de soi pour la remplir à peu près sereinement, quand même !).
les gratitudes mensuelles, etc.
Ce que j’aime moins, ou sur quoi il faut être vigilant
Il y beaucoup de modèles ! Ce n’est pas grave, en soi, à part que c’est qu’ils invitent tous à être utilisés, chacun a l’air utile et important. Mais à la fin, si on utilise tout… Ca finit par faire beaucoup, beaucoup de choses à faire, parce que beaucoup des modèles sont du suivi de quelque chose à faire (habit tracker, roue du rangement…).
Si tu te prends au jeu et que tu veux appliquer tout, tu vas juste te surcharger de choses à faire, suivre, prévoir … ce qui est juste le contraire de l’objectif initial : se décharger la tête. C’est bien de pouvoir poser, clarifier des objectifs, mais ça pourrait donner tendance à s’en créer plein. Et partir dans le jeu de la performance du développement personnel… le perfectionnisme de soi… ce qui est le contraire de se déculpabiliser, s’accepter… (ce qui permet d’avancer; les messages culpabilisants ne font qu’enfermer les gens dans leur problème). Il faut donc bien prioriser parmi tous ces modèles qui donnent envie de tout poser dans un idéal !
Certaines pages sont peut-être à prendre avec quelques pincettes, comme celle sur les affirmations positives, qui fait clairement référence à la loi de l’attraction.
Vous avez sûrement vu passer des messages qui y font plus ou moins explicitement référence : elle dit dans une version, que si on est positif, on attire le positif. Ca semble simple et plutôt logique, dans une certaine mesure, c’est peut-être vrai : en envisageant les choses sous un angle positif, on va faire des choix différents, être probablement plus ouvert, accepter ce qui peut nous faire avancer, être plus ouvert dans les relations aussi, etc. Sur ce qui dépend de nous, je pense que ça n’est pas totalement dénué de sens.
Le problème est dans la dérive de croyance sur cette idée, et elle est formulée comme ça dans le modèle en question : “tout ce qui nous arrive dans notre quotidien est attiré par nous-mêmes”. Vous voyez le gap ? C’est exactement ce que pointait Elisabeth Feytit dans son épisode sur la question. C’est vite culpabilisant : s’il t’arrive des m*rdes, c’est que tu n’est pas assez positif. Bref, c’est de ta faute. Sois positif, le positif viendra : 🤮 Allez va dire ça à un dépressif, merci. Non, c’est du 2nd degré, hein, en fait, ne va surtout pas lui dire un truc pareil !!
Bon, et en plus, ça marche pas vraiment, les affirmations positives. Je vois plein de gens qui s’en servent, mais pour essayer de se convaincre eux-mêmes que ça va bien, dans cette espère d’injonction au bonheur qui est une injonction paradoxale, donc un truc juste bon à vous rendre plus mal :
Soit ils luttent pour se convaincre de penser positivement, mais comme ça ne fonctionne pas comme ça, ça ne marche pas, et donc ils se culpabilisent encore plus en croyant que c’est parce qu’ils ne le font pas bien …
Soit, en essayant de remplacer leurs pensées pas très agréables par des pensées positives… ils sont dans l’évitement de leurs propres pensées et émotions… ce qui est tout juste un mécanisme très fréquent dans la plupart des problèmes psychologiques et ne fait que les entretenir parce qu’on en a de plus en plus peur, mais plus on les fuit, plus elles reviennent ! (ça s’appelle l’évitement expérientiel).
Donc là, carrément non pour cette page. Surtout avec “mon avenir sera merveilleux”. Ben non, qu’est-ce que tu en sais ? Personne ne le sait ! Et si c’est pas le cas, comment tu vas supporter ??
Il y a une différence entre avoir une attitude confiante et ouverte sur la vie, et l’idéaliser. Trop chercher l’idéal n’amène que du négatif en parlant pourtant positif… (c’est vicieux non ?), parce que : quand et à quoi sauras-tu que tu as atteint un avenir “merveilleux” ? C’est quoi merveilleux ? Ca va te mettre dans une dynamique de comparaison (aux autres, à un toi futur idéal, ou passé idéal), et pas d’acceptation. Ca risque de n’être jamais assez bien…
L’autre qui est pour moi embêtante c’est la “cleaning zone” où tu fais le planning de l’organisation du ménage à la maison… et peut-être d’autres où les objectifs ne sont pas juste personnels, à toi.
Alors sauf à vivre seule, évidemment, où ça se justifie, ça pourrait rendre le bujo un piège pour celle qui le fait.. à vouloir se charger de tout ! C’est déjà assez souvent le cas comme ça, et ce n’est pas parce que ça ne roule pas super à la maison et que peut-être c’est une bonne idée d’organiser, qu’il faut porter seule cette responsabilité. Quand ça ne marche pas comme on voudrait, on a souvent tendance à partir dans une dynamique de contrôle (pousser à agir dans tel ou tel sens, organiser, etc), mais… plus on prend en charge soi, moins les autres prennent leur part ! C’est ce que j’appelle l’effet vases communicants. Donc, ne vous y faites pas prendre !
Dans ce cas-là, s’il y a des sujets préoccupants dont la responsabilité est collective, peut-être trouver le moyen de faire un bujo collaboratif avec les autres participants de la maison ! Voilà un sujet qui demanderait un article à lui tout seul sans doute.
Voilà pour aujourd’hui !
Et vous ?
J’aimerais avoir vos retours sur ce style de sujet, si vous avez déjà essayé ce type d’outils, ce qui marche, ce qui ne marche pas, si vous avez senti parfois que vous pouviez partir dans un fonctionnement un peu piégeant, ou pas…
Et si vous avez découvert des idées avec cet article, ou pas !
A bientôt !